« Des souvenirs d’enfance et de quelques autres se dégage un sentiment d’inaccaparé et par la suite de dévoyé, que je tiens pour le plus fécond qui existe.
C’est peut-être l’enfance qui approche le plus de la « vraie vie » [...] »
André Breton, Manifeste du surréalisme, 1924
Ainsi se croise un regard d’adulte sur son monde d’enfant et des regards d’enfants sur un monde d’adulte. Dans ce chassé-croisé complexe, Agnieszka invente un dialogue, un conte en bleu et rose, où se tissent des liens symboliques, du cliché coloré à nos profondeurs archétypales. Le divin fripon, notre enfant intérieur selon le psychanalyste Carl Gustav Jung, se dévoile dans toute sa naïveté poétique et son espièglerie. Il démystifie le sacré dogmatique afin d’y apporter une touche d’humour burlesque et de magie. Il dénonce notre monde d’adultes « discipliné » en apparence par des codes stéréotypés, mais complètement absurde sur le fond. Il déjoue les traumas en portant notre regard vers des oiseaux, ailes déployées, planant avec indifférence sur nos humeurs sombres et nos interrogations métaphysiques. Investis de nuages en papier déchiré et de ces oiseaux enfantins, les grands cieux surplombant des paysages mélancoliques, prennent une allure optimiste, nous immergeant doucement dans une rêverie méditative. Le travail d’Agnieszka nous parle aussi de la mémoire à travers la relation mères-enfants : portraits, auto-portraits, intervention presque systématique de son fils et de sa fille. Une relation générationnelle dont chaque regard se complémente subtilement. Une relation empreinte d’affection et de douceur sur des teintes sucrées. Enfant/adulte, psyché/monde, naïf/raffiné, féminin/masculin, triste/joyeux, polonais/français, naissance/memento mori, bleu/rose… Finalement, cette tendresse n’est-elle pas le fil d’Ariane au cœur d’un labyrinthe de dualités ?
Morgane MAUDET
Historienne des arts
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